Journée nationale du souvenir de la déportation 2020
Actualité
Mise à jour le 23/04/2020
La Journée nationale du souvenir de la déportation est commémorée chaque dernier dimanche du mois d’avril. Cette année c'est dimanche 26 avril. En raison du confinement et des restrictions sanitaires liées aux Covid-19, la cérémonie ne peut avoir lieu. C'est pourquoi, l’Association pour la mémoire des enfants juifs déportés (Amejd) du 12e arrondissement vous invite à lire ce texte de Jacques Wittenberg prononcé lors de la commémoration de 2016.
Cette année, notre Association pour la Mémoire des Enfants Juifs Déportés du 12e considère qu’il est plus nécessaire que jamais, en ces temps confinés, de poursuivre le devoir de mémoire. Nous le faisons en publiant des extraits du discours prononcé le 23 avril 2016 à l’occasion de la Journée de la Déportation par notre ancien Président, Jacques Wittenberg, malheureusement disparu en octobre 2019.
« Connaissez-vous Wannsee ? C’est une agréable petite commune au sud-ouest de Berlin. Son grand lac est un lieu de repos, de promenade et de baignade très prisé des Berlinois. Dans ce cadre idyllique, le 20 janvier 1942, une quinzaine de hauts responsables de l’administration allemande et d’officiers SS sont invités à se réunir. Le carton d’invitation mentionnait « discussion et petit déjeuner ». Reinhardt Heydrich, chef des services de sécurité du Reich qui présidait la réunion, présenta ce que l’administration nazie avait appelé́ « la solution finale de la question juive » Les délibérations furent courtes et le projet adopté sans réserve.
Comme dans la plupart des pays d’Europe sous domination allemande, la France voit le déclenchement de la « solution finale » sur son territoire. L’heure des abjections est arrivée et les nazis importent un savoir-faire qu’ils expérimentent depuis 1933.
D’abord raflés, puis rassemblés, parqués comme des bêtes dans des conditions innommables au Vel d’Hiv, à Drancy, à Beaune la Rolande, à Pithiviers, 11.174 enfants de tous âges sont séparés de leurs parents. Ce sont parfois des bébés serrés dans les bras de leur mère et dont le plus jeune dans le 12ème arrondissement, le nôtre, avait à peine 6 jours. Souvenez-vous, Chelmno, Auschwitz Birkenau, Belzec, Sobibor, Treblinka, Maïdanek, ils y furent gazés, assassinés, torturés, brulés, exterminés.
Je n’ose pas imaginer ce que l’on a fait à ces enfants, mais je le sais. Je n’ose pas me représenter les images de ces petits que l’on torture, mais je le sais.
Ils n’ont eu ni tombe ni sépulture et la vie leur a été déniée, refusée, enlevée.
Comment, après cette monstruosité, comprendre que la bête ne soit pas encore morte, qu’elle soit encore féconde et enfante le fruit de la haine et de l’intolérance, comme si les tortures, les monstruosités, les camps, toute cette honte de l’humanité n’avait pas suffi, n’avait servi à rien ?
Comment cet esprit de haine, aisé par le feu de l’exclusion, par les intégrismes de tous bords, peut-il à nouveau exister ?
Alors soyons vigilants, quand ici et ailleurs, certains groupuscules, certains enseignements, certains partis politiques crachent leur haine de l’autre et se révèlent porteurs d’une idéologie raciste, xénophobe, antisémite.
Ne laissons rien passer, stigmatisons les moindres dérives, car en la matière, rien n’est insignifiant, rien n’est banal. N’oublions pas le passé, c’est en l’oubliant que l’on se condamne à faire les mêmes erreurs.
Chaque génération a le devoir de refaire le chemin de l’humanité. Faisons-en sorte que notre France, votre France, soit vigilante face à l’abominable, et reste cette France courageuse, fraternelle, généreuse, unie dans la République, car c’est cette France, et nulle autre que nous aimons.
Et vous les enfants, que vous soyez Chrétiens, Juifs ou Musulmans, croyants ou non croyants, vous êtes les enfants de la République, vous êtes nos enfants, vous êtes l’avenir. Alors il ne tient qu’à vous que cet avenir soit radieux.
N’oublions pas, n’oublions rien, n’oublions jamais. Le pire est toujours probable, mais comme on ne peut exclure le meilleur, il est permis d’espérer. »
Aujourd’hui, dans une tout autre période, en ces temps de pandémie mondiale, il faut toujours refuser les boucs émissaires et affirmer comme valeurs universelles l’entraide, la solidarité et la coopération.
Ancien Président de l'Amejd 12e, Jacques Wittenberg, est malheureusement disparu en octobre 2019.
Amejd 12e