L’urbanisme transitoire au service du lien social et des solidarités

Actualité

Mise à jour le 11/06/2021

Ground Control, le Bastion de Bercy, et dès juillet d’autres lieux de la ZAC Bercy-Charenton… Ces lieux du 12e arrondissement ont un point commun : il s’agit de projets d’urbanisme transitoire. Pour créer du lien social, remplir des missions de solidarité ou sensibiliser à l’environnement, ces endroits occupent un espace vacant, une friche urbaine, de manière éphémère et apportent de la vie où il n’y en avait pas.
Entre les concertations, les consultations, les études d’impact, les concours d’architectes, les instructions de permis de construire, ou même les difficultés à trouver fonds et fournisseurs, les projets urbains prennent de nombreuses années entre la décision d’aménagement et le début des travaux. Plutôt que de laisser ces lieux et cette temporalité vide, a fortiori dans une ville si dense que Paris, cet interstice spatio-temporel est investi temporairement, à l’image des Grands Voisins dans le 14e.

Rendre utiles des lieux vides et inaccessibles

À l’origine, la nature a horreur du vide. Un site inoccupé ne le restera pas longtemps. Cette transformation informelle de sites laissés sans but est aussi ancienne que la ville elle-même. L’urbanisme transitoire en est une évolution juridiquement et sanitairement sécurisée, contractuelle et officielle. C’est même devenu au fil des ans une stratégie de valorisation de friches. Friches industrielles en attente de devenir des projets immobiliers, bureaux vides, zones ferroviaires qui épouseront bientôt une nouvelle vocation, les espaces vacants sont nombreux en ville. Si les sites industriels traditionnels sont de moins en moins disponibles, les évolutions urbaines amènent nécessairement ce type de lieux éphémères.

Un nombre de projets transitoires en augmentation

Aujourd’hui, on compte plus de 80 sites transitoires, uniquement en Île-de-France. Comme un effet secondaire de la crise économique qui a entraîné la cessation d’activité de nombreux sites mais pas pour autant de baisse du foncier, le nombre de lieux vides a fortement augmenté depuis 2010. Il y a fort à parier que les nouvelles habitudes poussées par la pandémie comme le télétravail accentuent encore ce phénomène.
Dans le même temps, les projets d’urbanisme ont augmenté très largement la durée du temps écoulé entre l’abandon de l’activité d’un lieu en vue de sa transformation et le début effectif des travaux. Il peut se passer parfois jusqu’à une quinzaine d’années entre la décision de transformer un ensemble et la pose de la première pierre.

Avec d’un côté des artistes, des associations voire des entrepreneur·euses et des commerçant·es qui ne peuvent plus accéder aussi facilement à des locaux et de l’autre des sites en attente de travaux, la synergie était facile à trouver et de nombreuses collectivités y ont vu l’opportunité de favoriser l’émergence de projets artistiques, ludiques ou associatifs, libérés du marché de l’immobilier.

Des utilisations diverses, passer de l’éphémère au transitoire

Les utilisations les plus visibles de ces espaces sont certes festives. Bars branchés et lieux de fête ne représentent pourtant qu’une partie des usages de ces lieux. Ils peuvent être des opportunités pour des associations, d’accéder à des locaux opérationnels pour un loyer très modéré. La clé d’un succès d’un lieu transitoire est une vision solide, une sobriété agile et un dialogue ininterrompu avec les riverain·es, au profit notamment des publics les plus fragiles et les plus démunis. Aide au logement temporaire, projets artistiques, végétalisation, jeux pour enfants, fonctionnement en autogestion, le transitoire rend les enjeux financiers moins cruciaux et permet des expérimentations qui sont amenées à nourrir les visions de la ville de demain dans une production collective.

Et dans le 12e ?

Dans le 12e, il existe en ce moment plusieurs sites éphémères, qui s’étalent sur plusieurs temporalités et représentent des utilisations très différentes de friches urbaines. Ground Control est le plus connu, mais la très grande zone du futur projet Bercy-Charenton offre quant à elle une multitude de possibilités en attendant que les travaux démarrent.

Ground Control, un site bien installé

Situé dans la halle bientôt rénovée dans le cadre du futur quartier Les Messageries, sur une friche ferroviaire de SNCF, Ground Control a investi le 12e en 2017 après plusieurs autres expériences sur d’autres sites parisiens éphémères depuis 2014. Son succès foisonnant et son utilisation intelligente des 4500m² de la Halle des Charolais repose sur des piliers solides : action sociale, programmation culturelle, sensibilisation environnementale, lieu de sociabilité, et enfin, alimentation.
Ground Control accueille également des associations comme L’École des Sans Écoles, qui offre une scolarité aux mineur·es étranger·ères isolé·es, ou encore la permanence du Refugee Food Festival qui met en avant le talent culinaire de chef·fes réfugié·es, pour favoriser leur intégration.

Pendant cette période difficile, Ground Control joue un rôle central et indispensable pour venir au soutien des plus vulnérables. Avec le soutien de la Ville de Paris et de la Mairie du 12e, Ground Control est le théâtre de l’une des plus importantes distributions alimentaires à destination des étudiant·es, organisée par l’association Linkee et ses partenaires. Chaque semaine, c’est plus de 25 000 repas qui sont distribués sans condition aux jeunes qui souhaitent en bénéficier, en plus de paniers alimentaires. En moyenne, 7 tonnes de nourriture sont distribuées en quelques heures tous les samedis midi. D’autres services sont aussi proposés : discussion avec un·e psychologue des Psys du Coeur, aide au logement, aide aux étudiant·es Erasmus, etc.

La ZAC Bercy-Charenton

Développer les solidarités grâce aux sites transitoires

Alors que le projet immobilier de la ZAC Bercy-Charenton a été remis à plat sur cet espace multiple de plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés, l’association Aurore a déjà investi deux lieux pour des actions de solidarités. Le Centre d'Hébergement d’Urgence du Bastion de Bercy accueille depuis décembre 2017 un minimum de 308 personnes selon les compositions familiales : des personnes seules, hommes et femmes, à partir de 18 ans, des couples et des familles. Le centre est ouvert sur son territoire en y accueillant notamment des activités et structures de l’extérieur qui font vivre le site et anime les résident·es. Le bâtiment est construit à partir d’anciens containers, ce qui en fait un bâtiment complètement modulable.

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Le Centre d'Accueil et d'Insertion des Réfugiés Poniatowski est un dispositif expérimental qui accueille depuis octobre 2019 des hommes isolés, réfugiés statutaires, sortant souvent d’une période de rue, et propose un accompagnement innovant vers l’accès au logement et à l’insertion professionnelle. D’une capacité de 200 lits et pour une durée de 6 mois renouvelables, son but est d’orienter ses bénéficiaires vers un logement permanent ainsi qu’une situation professionnelle stable. Construit dans un ancien hangar de logistique, cet espace transitoire permet aux personnes de se stabiliser pour s’insérer socialement et professionnellement.
Depuis son ouverture en octobre 2019, le CAIR tisse également des partenariats avec les acteurs et actrices de l’insertion professionnelle ainsi qu’avec les entreprises, chantiers d’insertion et agences d’intérim, sur lesquels les résidents en recherche d’emploi peuvent s’appuyer. Des job datings ainsi que des sessions d’informations sont aussi organisées dans le centre, pour faciliter la rencontre entre ces structures et les personnes accueillies.

Un nouveau Grands Voisins

Dès le mois de juillet, Yes we camp, Plateau Urbain, l’association Coup de pousses et Ancoats vont investir le site pour recréer la magie des Grands Voisins, projet transitoire qui a enchanté la friche de l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul dans le 14e arrondissement. La recette sera répliquée : omniprésence de l’art et de la culture, biodiversité, bars, convivialité, animation et solidarités.

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Le jardin sera ouvert aux visiteur·ses et accueillera un potager hors-sol, des espaces de biodiversité à protéger, mais aussi un bar, des barbecues en accès libre et une scène. Plusieurs structures associatives seront au cœur du projet afin de proposer différentes activités : médiation scientifique, balades à vélo, etc. La friche accueillera également une programmation culturelle tout l’été en lien avec la Ville, des soirées de musique et spectacles en plein air, ou encore un festival de cuisine.
Dès le début de l’automne 2021, la friche continuera de se développer avec l’accueil de structures culturelles et de l’économie sociale et culturelle dans les bureaux inoccupés, le développement du jardin qui comprend une partie de la Petite Ceinture, ainsi qu’une programmation festive et culturelle.